Un livre très iconoclaste et courageux, aux antipodes du politiquement correct, intitulé La Menace mondiale de l’idéologie wahhabite : aux origines du terrorisme qui frappe la France, vient de sortir chez VA Editions. Nous avons rencontré Eric Denécé, directeur du Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R), coordinateur de cet ouvrage collectif réunissant les meilleurs spécialistes français du sujet.
Q : Eric Denécé, vous venez de publier chez VA Editions un ouvrage collectif intitulé La Menace mondiale de l’idéologie wahhabite. Qu’avez voulu démontrer à travers cet ouvrage ?
Avec une douzaine d’éminents spécialistes français et étrangers du Moyen-Orient et du terrorisme, il nous paraissait essentiel, pour la première fois en France, de dénoncer ouvertement l’influence néfaste de l’idéologie wahhabite sur l’islam et le danger que constituent les promoteurs et les adeptes de cette idéologie extrémiste (Al-Qaeda, Daesh, etc.) pour la paix et la sécurité mondiales.
Ensemble, nous avons ont voulu montrer qu’à travers la diffusion de son idéologie haineuse et son soutien aux groupes djihadistes, l’Arabie saoudite est en grande partie responsable de la situation chaotique d’un Moyen-Orient aujourd’hui à feu et à sang. Une telle démarche d’explication est absolument nécessaire si nous souhaitons lutter efficacement contre le terrorisme.
Q : A vous entendre, nous aurions donc une perception déformée du régime saoudien et de la respectabilité des régimes au Moyen-Orient ?
En effet, nous sommes face à une véritable falsification de la réalité. Aujourd’hui, les Américains désignent très officiellement l’Iran, le Soudan et la Syrie comme Etats sponsors du terrorisme, alors que Ben Laden et la majorité des terroristes du 9/11 étaient Saoudiens, que l’idéologie dont se réclament les djihadistes est celle de Riyad et que la CIA a soutenu, jusqu’en juillet 2017, l’opposition islamiste à Bachar El-Assad. Nous sommes donc en présence d’une vaste opération de désinformation en raison de l’entente objective et machiavélique entre les Etats-Unis – chefs de file de l’Occident « démocratique » – et l’Arabie saoudite – Etat prônant l’islam le plus radical qui soit – pour le contrôle du pétrole et du Moyen-Orient.
Le rôle central du royaume saoudien dans la diffusion de cette gangrène idéologique est un sujet que nos autorités gouvernementales se refusent à évoquer. En France comme ailleurs, les élites occidentales, complices ou clientes des Saoudiens, ferment les yeux sur la diffusion du wahhabisme qui sape pourtant les fondements de nos sociétés libérales et laïques. Or, nous ne pouvons espérer réduire le terrorisme par de seules mesures sécuritaires. Il donc est essentiel de lutter contre l’idéologie qui en est à la fois le terreau et le carburant.
Q : Le wahhabisme est-il vraiment une idéologie fanatique ?
Il convient de dire clairement les choses : le wahhabisme est une idéologie religieuse extrémiste profondément sectaire, antisémite, raciste et misogyne, prétendant revenir au temps du prophète. Cette dérive de l’islam apparue au XVIIIe siècle est un courant très minoritaire de l’islam sunnite. Mais depuis plusieurs décennies, le wahhabisme s’est infiltré dans les sociétés arabo-musulmanes avec le but clairement affiché de s’imposer comme la seule référence islamique et morale. Sa diffusion se traduit systématiquement par la division entre les musulmans, l’élimination des minorités non islamiques, le rejet de l’Occident, la haine, la violence, les conflits.
Rien de cela n’aurait été possible sans son instrumentalisation par une dynastie familiale – les Al-Saoud - qui s’est emparée d’un Etat - l’Arabie saoudite - et consacre ses ressources à l’exportation de cette vision régressive et combattante de l’islam. Et cette idéologie est si puissante qu’elle pousse des centaines d’individus au sacrifice lors d’opérations suicide et à des actes d’une infinie barbarie au nom de leur vision étroite de l’islam.
Q : Quelle est alors la nature véritable du royaume saoudien ?
L’Arabie saoudite est un royaume profondément inégalitaire, bafouant les libertés politiques et religieuses. C’est l’un des Etats au monde respectant le moins les droits de l’Homme.
- La démocratie n’y existe pas : le pays est une monarchie absolue où le pouvoir est concentré dans les mains du souverain et du cercle familial. Les partis politiques et les syndicats sont interdits.
- Toutes les questions liées à la société, à la famille, à l’individu, à l’enfant sont prises sur des principes qui remontent à l’époque des premiers califes (VIIe siècle).
- Les discriminations religieuses sont permanentes. Toute autre religion que le wahhabisme est bannie.
- La liberté d’expression y est inexistante, à l’exemple du bloggeur Raif Badawi, militant pour une libéralisation du régime, emprisonné depuis 2012, qui reçoit régulièrement des dizaines de coups de fouets en attendant une éventuelle décapitation ou même la crucifixion.
- Le respect du droit du travail et des droits des étrangers est inexistant. Sur une population de 29 millions d’habitants, 10 millions sont des immigrés et 2,9 millions vivent dans des conditions proches de l’esclavage. Ceux qui revendiquent les plus élémentaires droits humains sont pendus ou décapités.
- Surtout, les inégalités entre les sexes restent très importantes : la ségrégation est de rigueur dans les espaces publics et les femmes ne peuvent sortir qu’entièrement recouvertes de l’Abaya, tunique noire ne découvrant que les yeux. Elles doivent avoir un tuteur masculin (Mahram) - le père, le frère, l’époux, etc. - et ne peuvent rien faire sans être accompagnées de celui-ci. Elles doivent recevoir son autorisation pour se marier, voyager, s’inscrire à l‘école ou à l’université et accéder aux services de santé. En revanche, la polygamie des hommes est permise.
Avec une douzaine d’éminents spécialistes français et étrangers du Moyen-Orient et du terrorisme, il nous paraissait essentiel, pour la première fois en France, de dénoncer ouvertement l’influence néfaste de l’idéologie wahhabite sur l’islam et le danger que constituent les promoteurs et les adeptes de cette idéologie extrémiste (Al-Qaeda, Daesh, etc.) pour la paix et la sécurité mondiales.
Ensemble, nous avons ont voulu montrer qu’à travers la diffusion de son idéologie haineuse et son soutien aux groupes djihadistes, l’Arabie saoudite est en grande partie responsable de la situation chaotique d’un Moyen-Orient aujourd’hui à feu et à sang. Une telle démarche d’explication est absolument nécessaire si nous souhaitons lutter efficacement contre le terrorisme.
Q : A vous entendre, nous aurions donc une perception déformée du régime saoudien et de la respectabilité des régimes au Moyen-Orient ?
En effet, nous sommes face à une véritable falsification de la réalité. Aujourd’hui, les Américains désignent très officiellement l’Iran, le Soudan et la Syrie comme Etats sponsors du terrorisme, alors que Ben Laden et la majorité des terroristes du 9/11 étaient Saoudiens, que l’idéologie dont se réclament les djihadistes est celle de Riyad et que la CIA a soutenu, jusqu’en juillet 2017, l’opposition islamiste à Bachar El-Assad. Nous sommes donc en présence d’une vaste opération de désinformation en raison de l’entente objective et machiavélique entre les Etats-Unis – chefs de file de l’Occident « démocratique » – et l’Arabie saoudite – Etat prônant l’islam le plus radical qui soit – pour le contrôle du pétrole et du Moyen-Orient.
Le rôle central du royaume saoudien dans la diffusion de cette gangrène idéologique est un sujet que nos autorités gouvernementales se refusent à évoquer. En France comme ailleurs, les élites occidentales, complices ou clientes des Saoudiens, ferment les yeux sur la diffusion du wahhabisme qui sape pourtant les fondements de nos sociétés libérales et laïques. Or, nous ne pouvons espérer réduire le terrorisme par de seules mesures sécuritaires. Il donc est essentiel de lutter contre l’idéologie qui en est à la fois le terreau et le carburant.
Q : Le wahhabisme est-il vraiment une idéologie fanatique ?
Il convient de dire clairement les choses : le wahhabisme est une idéologie religieuse extrémiste profondément sectaire, antisémite, raciste et misogyne, prétendant revenir au temps du prophète. Cette dérive de l’islam apparue au XVIIIe siècle est un courant très minoritaire de l’islam sunnite. Mais depuis plusieurs décennies, le wahhabisme s’est infiltré dans les sociétés arabo-musulmanes avec le but clairement affiché de s’imposer comme la seule référence islamique et morale. Sa diffusion se traduit systématiquement par la division entre les musulmans, l’élimination des minorités non islamiques, le rejet de l’Occident, la haine, la violence, les conflits.
Rien de cela n’aurait été possible sans son instrumentalisation par une dynastie familiale – les Al-Saoud - qui s’est emparée d’un Etat - l’Arabie saoudite - et consacre ses ressources à l’exportation de cette vision régressive et combattante de l’islam. Et cette idéologie est si puissante qu’elle pousse des centaines d’individus au sacrifice lors d’opérations suicide et à des actes d’une infinie barbarie au nom de leur vision étroite de l’islam.
Q : Quelle est alors la nature véritable du royaume saoudien ?
L’Arabie saoudite est un royaume profondément inégalitaire, bafouant les libertés politiques et religieuses. C’est l’un des Etats au monde respectant le moins les droits de l’Homme.
- La démocratie n’y existe pas : le pays est une monarchie absolue où le pouvoir est concentré dans les mains du souverain et du cercle familial. Les partis politiques et les syndicats sont interdits.
- Toutes les questions liées à la société, à la famille, à l’individu, à l’enfant sont prises sur des principes qui remontent à l’époque des premiers califes (VIIe siècle).
- Les discriminations religieuses sont permanentes. Toute autre religion que le wahhabisme est bannie.
- La liberté d’expression y est inexistante, à l’exemple du bloggeur Raif Badawi, militant pour une libéralisation du régime, emprisonné depuis 2012, qui reçoit régulièrement des dizaines de coups de fouets en attendant une éventuelle décapitation ou même la crucifixion.
- Le respect du droit du travail et des droits des étrangers est inexistant. Sur une population de 29 millions d’habitants, 10 millions sont des immigrés et 2,9 millions vivent dans des conditions proches de l’esclavage. Ceux qui revendiquent les plus élémentaires droits humains sont pendus ou décapités.
- Surtout, les inégalités entre les sexes restent très importantes : la ségrégation est de rigueur dans les espaces publics et les femmes ne peuvent sortir qu’entièrement recouvertes de l’Abaya, tunique noire ne découvrant que les yeux. Elles doivent avoir un tuteur masculin (Mahram) - le père, le frère, l’époux, etc. - et ne peuvent rien faire sans être accompagnées de celui-ci. Elles doivent recevoir son autorisation pour se marier, voyager, s’inscrire à l‘école ou à l’université et accéder aux services de santé. En revanche, la polygamie des hommes est permise.